Quel avenir urbain pour Marseille ? (14/6/2014)

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Quel avenir urbain pour Marseille : Comment interpréter la tendance à la verticalité qui se dessine avec la reconfiguration du « water-front » ?

Marseille se construit un nouveau front de mer, espace « pacifié » avec trois tours en projet au cœur d’Euroméditerranée, ébauche d’une future « skyline » marseillaise rêvée par ses décideurs :
• la tour de logements de luxe « H99 » (1),
• la tour de bureaux « La Marseillaise » construite par l’architecte Jean Nouvel pour le compte du promoteur Constructa,
• la tour du promoteur Icade.
N’est-ce pas la preuve que Marseille a « accéléré », et entre dans la modernité sous le dessin de grands architectes ? Mais Marseille est-elle vouée à copier l’urbanisme des « villes mondialisées » dont le signe se veut une forêt d’IGH, Immeubles de Grande Hauteur ?

La densification passe-t-elle nécessairement par ces constructions, coûteuses à édifier et entretenir, ultra-sécurisées et écologiquement peu durables, comme le dit Thierry Paquot (2)?
Cette verticalité ne rime-t-elle pas avec ségrégation et recomposition du cœur de la ville, en écho au recul de la mixité sociale et à la relégation de ses actuels habitants ? A quelles logiques correspond l’investissement de Hedge Funds dans l’immobilier haut de gamme de bureaux et commerces à Marseille ? Est-ce aux contribuables de garantir la commercialisation d’immeubles privés, comme la « Marseillaise » ?

Residence-Le-Pharo_illustration-16-9Ou bien ces immeubles ne sont-ils pas constitutifs d’une identité architecturale marseillaise, à la lecture de l’étude de Thierry Durousseau : « Marseille, ensembles et résidences de la période 1955/1975 » (3).  Pourquoi construire de nouvelles tours alors que l’ANRU en démolit d’autres, des tours d’habitation de Picon à la Castellane considérées, elles, comme irrécupérables ? le sont-elles ?

La-Rouviere-ou-Super-Marseille-0938-Super-RouviereCes questions font dissensus au sein du collectif « pour la ville – pensons le matin » et seront débattues largement autour des contributions des quatre intervenants précités.

Séance organisée en partenariat avec l’association « Un Centre-Ville Pour Tous ».
Chateau-Sec 51 chemin Joseph Ayguier

(1) Pour découvrir la « H99 », l’immobilier prestige à Marseille, allez sur h99
(2) « La Folie des hauteurs : pourquoi s’obstiner à construire des tours ? » ; lire une interwiew de Thierry Paquot à Mouvements.net ici : Vers-un-urbanisme-sensoriel
(3) : Etude de Thierry Durousseau : « Marseille : ensembles et résidences à Marseille 1955-1975, 20 années formidables » – Bik & Book Edition, 2009. Cette étude, sous la commande de la DRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur, vise à identifier et valoriser les grands ensembles marseillais, inscrits dans la reconnaissance du patrimoine de la seconde partie du XXe siècle. Elle constitue un corpus considérable de 480 fiches immeubles totalisant 125 000 logements concernant plus de la moitié de la population marseillaise. Ou bien ici : Marseille-ensembles-et-residences-de-la-periode-1955-1975

Intervenants


  • Jean Canton :

urbaniste, spécialiste de la question foncière et de la planification sur divers territoires de France ; ancien directeur de l’Urbanisme à la Ville de Marseille

  • Thierry Durousseau
  • Patrick Lacoste
  • Fabrice Lextrait

 

Synthèse en cours


9h30 Au Grandes Tables de la Friche La Belle de mai




Il est 1 commentaire

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  1. Pascal DINCKI

    Bonjour,

    Quelques questions et réflexions à l’issue de cette rencontre.

    Comment parler d’un urbanisme pour Marseille sans avoir posé la question préalable :
    Quelle métropole (puisqu’au moins ce point semble posé) voulons-nous dans 20 à 30 ans? Sur quel schéma social et d’organisation ? Comment savoir si densification et tours sont un bon outil tant qu’on ne sait pas ce qu’on veut faire avec ?

    Et une prémisse induite : Qui décide de cette vision et du chemin, avec quelle légitimité ? Doit-on accepter, ce qui semble être le cas, que l’intérêt général passe après des décisions issues de lobbying d’intérêts privés, ou soit totalement oublié ? Qui plus avec de l’argent de la collectivité à un moment où à un autre, quoi qu’on en dise ?
    Sur cette question de gouvernance, peut-on imaginer des élus, gérants de collectivités, urbanistes, architectes, qui aideraient les citoyens à définir et décider leur projet sans apparaître, en étant des garde-fous contre les intérêts privés non compatibles avec l’intérêt général, et en acceptant de ne pas décider eux-même? Sortir de consultations à peine ébauchées, pour aller au-delà des concertations vers une réelle décision collective ? Ce qui implique bien entendu une vulgarisation importante des enjeux, outils, moyens.

    Pour en revenir à ce projet spécifique, comment s’inscrit-il (sachant que ce qui est important c’est logements et bureaux de luxe, quelle que soit la forme) dans une ville dont le problème actuel est une large jeunesse peu qualifiée, sans avenir visible et en perte de repères ?

    Nos jeunes devront-ils émigrer en Allemagne, comme 400 000 jeunes grecs et espagnols ?
    Pendant que nous espérons une immigration de cols blancs CSP+?

    Comment est prise en compte la mixité sociale dans ces projets ? Continuerons-nous à être la ville qui possède le plus de résidences fermées ? (Si on veut être cynique, la tour est effectivement un bon outil pour fermer facilement et sans que ce soit trop visible…)

    Continuerons-nous à être la ville dans laquelle le PLU affiche des zones de mixité sociale à 100% de logement social, ce qui est une vision « étonnante » de la mixité ?

    La mixité d’usage doit-elle s’entendre comme regroupement de logements de luxe, bureaux de luxe et commerces de luxe ? (Et doit-on comprendre qu’il faut penser le pendant, des zones d’activité, logement, commerces pour pauvres?)

    Peut-on dire : mixité de la mixité sociale et d’usage ?

    Une remarque pour les amoureux du symbole : Les Marseillais du 8ème qui sont essentiellement ceux qui mettent ces projets en avant les trouvent tellement bien qu’ils veulent construire un pont-levis, pardon, transbordeur, entre le 8ème et euroméditerranée. ;-))) … Alors, est-ce que ces projets correspondent à Marseille, à la métropole de demain ?

    Sur la densification :
    Un des intervenants évoquait la présence de 950 000 habitants en 1936 sur un territoire plus restreint, contre 850 000 aujourd’hui.
    Certes, l’évolution de l’habitat (surfaces moyenne / habitant en croissance, diminution du noyau familial moyen (du fait des célibataires et séparés entre autres), salles d’eau plus nombreuses et spacieuses, ..) explique une partie du problème. Des réponses existent pour remédier à cette évolution : modularité des logements pour les adapter facilement à l’évolution du noyau familial sans obliger les gens à déménager, redéveloppement de fonctions communes (laverie, rangements, et pourquoi pas chambres d’amis et pièces de réception.., à voir notamment les idées sur l’habitat partagé).
    Mais il me semble que le point principal d’évolution soit la place nécessitée par l’omniprésence des voitures en ville. Voies de circulation, stationnement, parking, quelle emprise ? Quelle surface condamnée (et au passage imperméabilisée) par les autoroutes, rocades du Jarret, L2, et autres BUS existants ou à venir?
    Alors qu’en 1936, pas de voitures, mais un dense réseaux de petits trams…
    Un point complémentaire sur les transports :
    Il a été dit que ces immeubles et commerces amenaient des voitures (et il suffit de passer dans la quartier pour voir que c’est vrai) malgré une offre de transports en commun.
    Une remarque triviale : un transport en commun a 2 extrémités, qu’y a-t-il à l’autre bout ? Le TC doit être bien conçu aux deux extrémités, y compris la desserte terminale adaptée, le tout inclus dans une vision globale projetée dans l’avenir. On en revient toujours au même point.

    En conclusion :
    Quel projet global fera de nouveau se croiser tous les marseillais, chacun se déplaçant moins et sans voiture, dans une ville avec des emplois et des logements pour tous ses habitants, des commerces, des équipements sociaux, culturels, sportifs, à taille humaine et à échelle locale ?
    Alors on pourra se demander si l’une ou l’autre tour est adaptée au projet…

    Pascal DINCKI


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